George Moore

Biographie
George Moore
George Moore

Romancier et poète irlandais, George Moore est né à Moore Hall (Ballyglass County, Irlande) le 24 février 1852.

Il a une enfance heureuse mais indisciplinée dans la propriété paternelle et apprend davantage des garçons d'écurie et des livreurs que des maîtres d'école. Son père, riche propriétaire terrien catholique, éleveur de chevaux et membre du Parlement, l'initie à Walter Scott. L'été, il passe ses vacances avec Oscar Wilde, son cadet de deux ans.

C'est un adolescent libre et frondeur. Avec son frère, il est envoyé à l'Oscott College de Birmingham, un collège de Jésuites d'où il est renvoyé pour paresse en 1867. Il ne rentre pas à l'Université.

En 1868, son père, réélu au Parlement, part à Londres avec toute sa famille. Il souhaite que son fils embrasse une carrière militaire, ce dernier refuse. Le décès paternel clôt le débat, assurant à George Moore un avenir de rentier.

À peine majeur, en 1873, il se rend à Paris pour apprendre la peinture à la célèbre académie Jullian. Il y apprend à comprendre les mystères de la couleur mais non à peindre. Il fréquente la société des écrivains et artistes impressionnistes qui se réunissent au café de la Nouvelle Athènes à Montmartre, s'enthousiasmant pour Édouard Manet, Edgar Degas, Camille Pissarro, Auguste Renoir et Jean-Baptiste Camille Corot, qui demeureront ses idoles en peinture comme Walter Pater, Honoré de Balzac, Stéphane Mallarmé et Ivan Tourgueniev en littérature.

En s'intéressant à Manet, il découvre Émile Zola et à travers Zola, Edmond de Goncourt. L'œuvre de celui-ci et de son frère exercera sur lui une grande influence. Mais la première influence littéraire que reçoit Moore à cette époque est celle de Charles Baudelaire, à tel point qu'en 1877, il publie à compte d'auteur un recueil de vers au titre caractéristique: Fleurs de passion.

Sur les conseils de son homme d'affaires, il revient en 1880 en Irlande pour mettre de l'ordre dans ses finances. A la même époque, il laisse définitivement tomber la peinture pour la littérature. En 1881, il tente d'écrire directement dans la langue de Baudelaire les Pagan Poems, influencés par le symbolisme. La destinée de poète mineur ne comble toutefois pas ses ambitions.

À partir de 1882, il débute une série de romans réalistes. Mais des sujets comme la prostitution, les relations extraconjugales, le saphisme ou l'alcoolisme sont mal vus, et mal lus, dans la bonne société londonienne. Un amant moderne (1883), La Femme du cabotin (1885), récit réaliste sur le thème d'Éole, et Un drame en mousseline (1886) sont interdits dans les cabinets de lecture. Moore répond à cette censure par deux pamphlets. En 1887, cette fois dans le sillage de Joris-Karl Huysmans, il publie Pur Accident, où fusionnent réalisme, symbolisme et décadentisme. Un an plus tard, il se lance dans l'autobiographie avec Les Confessions d'un jeune Anglais (1888, première version écrite en français), qui sort en même temps à Londres et à Paris. Dans Mike Fletcher (1889), il montre qu'il a assimilé l'aspect le plus accessible de la philosophie d'Arthur Schopenhauer, alors en vogue. Ses essais d'art, Impressions and Opinions et Modern Painting, introduisent l'impressionnisme en Angleterre.

À force d'imiter ses écrivains préférés, il finit par trouver sa voie avec le roman Esther Waters (1894), bien qu'il reste dans les thèmes du réalisme. En narrant les péripéties d'une domestique fille-mère, il réussit à surpasser un modèle comme Germinie Lacerteux des frères Goncourt, et donne un tableau harmonieux et poétique d'un côté populaire de la vie anglaise.

La même année, il rencontre Maud Alice Burke, une jeune américaine, lors d'un dîner au Savoy à Londres. Leur histoire d'amour se prolongera bien après le mariage de cette dernière avec Bache Cunard, l'héritier de la célèbre compagnie de transatlantiques à vapeur. Et Moore deviendra une sorte de mentor pour la fille de Maud, la rebelle Nancy Cunard, poète, éditrice, journaliste, également connue pour avoir posé en bracelets sous l'oeil de Man Ray et avoir failli rendre fou de passion Louis Aragon.

En 1895, George Moore publie Celibates, un recueil de nouvelles traduit en français sous le titre générique d'Albert Nobbs. Dans Evelyn Innes (1898), il donne un pendant anglais du Plaisir de Gabriele D'Annunzio.

En 1901, La guerre des Boers et la cruauté des camps de concentration de Kitchener le détachent de la vie anglaise. Fatigué de Londres et de ses pesanteurs, il repart en Irlande. Devenu mystique, il publie Sœur Thérèse (1901), où nous assistons à la prise de voile d'Evelyn. Pour ce roman il prend pour exemple En route de Huysmans.

A Dublin, il collabore au mouvement de renaissance artistique nationale, dans la mouvance de l'irish Literary Theatre. Pendant une dizaine d'années, il se joint à W. B. Yeats, John Millington Synge, lady Gregory, Edward Marlyn, et aux autres écrivains représentatifs de la renaissance celtique. Il écrit plusieurs pièces, dont l'une, Diarmuid and Grania, avec le poète William Butler Yeats (les deux hommes se fâcheront peu après). En 1903 sortent les nouvelles de Champ stérile, à la manière d'Ivan Tourgueniev mais sur la vie irlandaise, qui plaisent beaucoup à James Joyce.

Dans Le Lac (1905), l'histoire de l'évasion d'un jeune prêtre de la "prison du catholicisme" souligne son dégoût pour la religion de ses pères. Il annonce sa conversion au protestantisme dans les colonnes de l'Irish Times. En 1906, paraissent Mémoires de ma vie morte.

Il rentre définitivement à Londres en 1911 pour s'installer dans une maison d'Ebury Street, avec ses tableaux, ses livres, mais sans le téléphone, qu'il abhorre. Il rapporte ses souvenirs d'Irlande, ses enthousiasmes et ses désillusions littéraires et artistiques dans la trilogie autobiographique Salut et Adieu (1911, 1912, 1914). La réalité et la fantaisie se mêlent dans ce livre mouvant et malveillant. Comme il avait inspiré le titre des Mémoires de ma vie morte, le Journal des frères Goncourt fournit le modèle de ce recueil de confidences et d'indiscrétions, mais au lieu de la mesquinerie bourgeoise des Goncourt, George Moore a une malice de nature aristocratique, audacieuse, tout autre que pédantesque et toujours assaisonnée d'exubérance irlandaise.

Il écrit un drame, L'Apôtre (1911), qui contient en germe son prochain roman. En 1913, il part en Palestine et écrit La Solitude du Kerith (1916), qui veut, comme Ernest Renan, humaniser le Christ, et postule que Jésus est parti chercher la sagesse en Inde.

Il effectue de fréquents séjours en France, notamment avec Nancy Cunard, dans la campagne dieppoise et le Montparnasse des années folles.

Il poursuit dans la même veine que Salut et Adieu avec Avowals (1919) et Conversations à Ebury Street (1924), ainsi appelé du nom de la rue de Londres où il habite.

Dans Héloïse et Abélard (1921), il porte à la perfection la méthode de la narration orale. Comme dans La Solitude du Kerith, on y perçoit l'influence de Walter Pater. C'est aussi de lui que procède la prose dense et sinueuse caractéristique de sa maturité d'écrivain. La Solitude du Kerith devient le drame The Passing of the Essenes. Pour le théâtre il écrit aussi La Venue de Gabrielle (1923) et La Création d'un immortel (1926), où William Shakespeare est traité avec peu de respect. Sa dernière œuvre, Aphrodite en Aulide (1931), est récrite plusieurs fois et se ressent de l'influence des anciens romanciers grecs, surtout dans le style. L'édition de ses Lettres à Lady Cunard (1957) est posthume.

En tout, George Moore a publié une cinquantaine d'ouvrages. Son oeuvre est faite d'une série d'expériences, son affirmation est le résultat d'une suite de contradictions. Le génie a été pour lui, comme l'a remarqué avec esprit un critique, le fruit d'une longue impatience.

George Moore est mort à Londres des suites d'une urémie le 21 janvier 1933, à l'âge de 80 ans.

Mario Praz,

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Paris, vendredi 29 mars 2024