Les soeurs Brontë: Charlotte, née à Thormon (Yorkshire) le 21 avril 1816, morte à Haworth le 31 mars 1855. Emily Jane, née à Thornton le 20 août 1818, morte à Haworth le 19 décembre 1848. Anne, née à Thornton le 25 mars 1820, morte à Scarborough le 28 mai 1849.
Le pseudonyme de ces trois femmes de lettres anglaises est Bell (Ellis Bell pour Emily, Currer Bell pour Charlotte et Acton Bell pour Anne), les initiales des prénoms supposés correspondant aux prénoms réels.
Charlotte, Emily et Anne sont les filles du révérend Patrick Brontë, qui a quitté la ferme paternelle et l'Irlande pour faire ses études à Cambridge. Il accepte d'abord une cure dans l'Essex, et, ensuite, à Hartford, où il épouse Maria Branwell qui lui donnera six enfants. Il reste veuf (1821) peu après la naissance d'Anne, et son humeur déjà bizarre devient alors tyrannique. Il confie le soin de s'occuper de la maison à la sœur de sa femme, et ne tarde pas à placer quatre de ses cinq filles à l'institution de Cowan Roe, tout récemment fondée pour les enfants d'ecclésiastiques. Le régime y est d'une telle dureté que les deux aînées, Mary et Elisabeth, sont rapidement emportées par la tuberculose.
La vie n'est guère plus douce à la maison Brontë, mais les enfants y jouissent au moins de la liberté de courir dans les landes de bruyères battues par le vent qui serviront de toile de fond à toutes leurs œuvres.
Emily et Charlotte quittent Cowan Roe, et pendant plusieurs années, à peine instruites par leur père, vivent entièrement livrées à elles-mêmes. Pour Charlotte, il y a une année d'interruption dans ce vagabondage, celle qu'elle passe à l'école de Roe Head où, en 1835, elle retournera comme institutrice. Une telle adolescence privée d'affection et de soins exacerbe leur sensibilité naturellement très vive et c'est de ces années de liberté que datent les histoires fantastiques et les récits "noirs" connus sous le titre de Légendes d'Angria, qui sont le fruit de la collaboration des trois sœurs Brontë et de leur frère Branwell.
Charlotte et Emily décident de se rendre indépendantes en gagnant leur vie. La seule voie possible leur paraissant l'enseignement, elles partent pour Bruxelles afin de s'y perfectionner en français. Rappelées en Angleterre par la mort de leur tante, seule Charlotte revient au pensionnat Heger, et tire de son séjour le sujet du Professeur. Son stage terminé, elle rentre à Haworth et, avec Emily et Anne, qui s'était placée entre-temps comme gouvernante, tente d'ouvrir une école. Mais elles doivent bientôt fermer, faute d'élèves. Il est probable que la réputation déplorable de leur frère, dont les débauches sont connues dans tout le pays, n'est pas étrangère à cet échec.
Que tenter, sinon d'écrire ? Les trois soeurs Brontë en avaient toujours eu le goût. Elles se mettent au travail et, à compte d'auteur, paraissent en 1845 les Poésies des sœurs Brontë: nouvel échec.
Elles s'essaient alors dans le roman, et simultanément donnent, pour Charlotte: Le Professeur, pour Emily: Les Hauts de Hurle-Vent, et pour Anne: Agnès Grey. Les deux derniers livres sont acceptés par des éditeurs, mais Le Professeur est refusé.
Véritable poème inspiré, Les Hauts de Hurle-Vent, écrit par Emily, est l'une des œuvres les plus étranges et les plus passionnantes de la littérature anglaise. L'adjectif "wuthering" que renferme le titre original est une variante du mot dialectal d'origine écossaise "whither", substantif et verbe évoquant la tempête qui tourne autour de la maison du personnage principal et symbolise pour ainsi dire le décor sonore du roman. Du mélange d'ingénuité et d'intuition pénétrante d'Emily dérive le double aspect du récit: à la fois pure création d'une imagination ensorcelante et image d'une surprenante vérité. La puissance et la nouveauté de son livre serviront de modèle à de nombreux romans anglais post-victorien.
Charlotte quant à elle ne se décourage pas devant sa déconvenue. Egalement très douée, elle sent en elle des possibilités d'authentique écrivaine et en 1847 elle écrit Jane Eyre, dont le succès est foudroyant, le nom de Currer Bell passant au premier plan de l'actualité littéraire du royaume. Le public a tôt fait de dévoiler la personnalité qui se cache derrière le pseudonyme, et elle est bientôt sollicitée de toutes parts. Mais, au moment où elle peut enfin jouir de son triomphe, commence une période douloureuse au cours de laquelle elle perd successivement Emily, puis Branwell, emporté par une crise de delirium tremens, et enfin Anne, qui a eu le temps de mettre la dernière main à La Dame du château de Wildfell avant de mourir.
Charlotte refuse de quitter son pays sauvage. Le travail devient son refuge. En 1849, paraît Shirley, œuvre un peu moins convaincante que les précédentes, mais qui révèle d'autres aspects de la personnalité de son auteur. Charlotte n'écrit que des romans autobiographiques: Villette, son chef-d'œuvre publié en 1853, montre d'ailleurs avec quelle simplicité et quelle habileté naturelle elle sait se renouveler.
La même année, le révérend Brontë meurt. En 1854, Charlotte épouse le révérend Nichols, suppléant de son père à la cure de Haworth mais, rongée par la maladie, elle s'éteint à son tour quelques mois après.
Mélanie Wolfe,
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Paris, mardi 26 septembre 2023