Han Ryner

Biographie
Han Ryner
Han Ryner

Philosophe, écrivain et journaliste français, Han Ryner — pseudonyme de Henri Ner — est né le 7 décembre 1861 à Nemours (département d'Oran, Algérie). Son père est receveur des postes, sa mère institutrice libre.

Il passe une partie de son enfance à Rognac (Bouches-du-Rhône) puit suit des études de philosophie. Il devient professeur aux collèges de Draguignan, puis de Sisteron, Gray, Bourgoin et Nogent-le-Rotrou. Il est ensuite répétiteur aux lycées Louis-le-Grand et Charlemagne de Paris.

Après la mort de sa mère, il rompt avec la religion et se fait franc-maçon, à Gap, où il est frère orateur de 1884 à 1888. Il s'intéresse aux idées sociales.

En 1892, avec Émile Saint-Lanne, il propose dans La Paix pour la vie, la socialisation du pain, idée reprise par Victor Barrucand et Pierre Kropotkine. En 1896, il co-fonde et dirige le Syndicat des répétiteurs et professeurs adjoints.

Il commence à fréquenter les milieux littéraires, publie deux romans en 1894-1895, et rencontre Alphonse Daudet.

C'est en 1898 qu'il adopte le pseudonyme de Han Ryner. Sa philosophie, individualiste, s'exprime d'abord dans un roman, Le Crime d'obéir, publié dans la revue La Plume (1899-1900), roman qui met en scène un réfractaire à l'exploitation économico-sociale de l'homme, objecteur de conscience avant la lettre. Sans adhérer à une idéologie anarchiste, il s'oppose à toute organisation coercitive.

Lors de l'affaire Dreyfus, Han Ryner entre dans l'arène avec ses amis de la revue Demain dont il est rédacteur en chef. Il participe ensuite aux Universités populaires et, de 1903 à 1907, à l'Université populaire Saint-Antoine où il fait une série de cours sur l'individualisme et son histoire. Il collabore à l'Art social de Gabriel de La Salle, à l'Art pour Tous, au Château du Peuple (La Coopération des Idées) d'Émile Vitta, au Cri du Quartier, à l'Ennemi du Peuple d'Émile Janvion et Francis Jourdain, à L'Humanité nouvelle d'Augustin Hamon (1900) et tient la rubrique littéraire et philosophique dans Les Partisans (1900-1901).

En 1905, dans son roman Le Sphinx rouge, il pose le problème de la guerre internationale. Sa dénonciation vigoureuse de l'insincérité en littérature dans Le Massacre des Amazones (1899) et dans Prostitués (1904)lui vaut une «conspiration du silence» dans la presse qui ne sera rompue qu'en 1912, lors du référendum du journal L'Intransigeant pour un «Prince des conteurs» où il est poussé par les jeunes auteurs.

Han Ryner intervient pour Eugène Dieudonné, impliqué dans l'affaire des «Bandits tragiques» (1913). Il est admis par les équipes groupées autour d'Émile Armand: L'Anarchie, L'Ère nouvelle, Les Réfractaires, Hors du troupeau (1905-1914), et collabore à L'Idée libre de Lorulot. Il collabore aussi aux Hommes du Jour d'Henri Fabre et à ses Portraits d'hier. Un roman d'anticipation utopique refusé pendant dix ans par les éditeurs paraît en 1914: Les Pacifiques. Il y décrit une société anarchiste dans laquelle les humains vivent en harmonie entre eux et avec la nature, cette société ayant vu le jour suite à une véritable révolution non-violente; telle qu'elle sera ensuite incarnée par le Mahatma Gandhi.

Durant la guerre, il ne renie pas sa position universaliste, son antimilitarisme, son pacifisme non-violent. Il lutte pour la reconnaissance de l'objection de conscience. Au Salon Lamartine en 1915, il célèbre «Lamartine et la Paix». Il maintient, autant que le permet la censure de l'époque, les droits d'une philosophie libre dans Par-delà la mêlée d'Émile Armand et dans La Mêlée de Pierre Chardon. Sébastien Faure l'appelle à Ce qu'il faut dire pour la critique littéraire (1916-1917). Il répond dans La Veilleuse (1917) «Comment te bats-tu? » à Henri Barbusse qui avait demandé «Pourquoi te bats-tu?». Il glisse sa parole de paix aux Cahiers idéalistes d'Édouard Dujardin, aux Humbles de Maurice Wullens qui glorifient Romain Rolland.

La guerre terminée, Henri Fabre lui offre une tribune hebdomadaire dans le Journal du Peuple quotidien (1920-1922). Han Ryner y défend certaines victimes de la guerre: réfractaires, insoumis, emprisonnés politiques, et contribue notamment à faire libérer Emile Armand et surtout Gaston Rolland. Au Comité de défense sociale, il intervient, dès 1921, pour Nicola Sacco et Bartolomeo Vanzetti et, devant les tribunaux militaires, témoigne pour les objecteurs de conscience, contre les expulsions administratives, pour les marins de la mer Noire et pour Nestor Makhno, contre la terreur blanche en Hongrie, pour Nicolas Lazarévitch en URSS et pour Francesco Ghezzi en Italie.

Han Ryner soutient les essais de colonies naturistes libertaires (telle celle de Bascon), prend part aux mouvements anticolonialistes et aux campagnes pour l'instruction hors des méthodes et programmes officiels. Il collabore aux revues libertaires espagnoles et à celles d'Amérique latine, aux publications anarchistes françaises: Le Libertaire, L'En Dehors, la Revue anarchiste, La Voix libertaire, et rédigea une vingtaine d'articles pour l'Encyclopédie anarchiste de Sébastien Faure.

Il refuse toute doctrine imposée et dénie la séparation, qu'il estime artificielle, en nations et en classes. Il se montre toujours très sceptique quand à l'efficacité des révolutions violentes, leur préférant les méthodes de non-coopération et de non-violence. Il considère qu'aucune société réellement humaine ne peut advenir sans une révolution intérieure opérée par chaque individu en lui-même. Il réinvestit ainsi en l'adaptant la figure du sage antique, attaché plus que tout à sa liberté intérieure et dédaigneux des lois de la cité. Son éthique s'inspire largement des philosophes antiques: Socrate, Epicure, les Cyniques et les Stoïciens, qu'il met en scène dans de nombreux récits tels Les Véritables entretiens de Socrate (1922) et Les Chrétiens et les philosophes (1906). Il montre une certaine tendresse pour la figure de Jésus, qu'il présente comme un doux révolté à l'impuissance tragique dans Le Cinquième évangile (1910). Ce qui ne l'empêche pas de mener par le verbe et par la plume un combat anticlérical résolu, notamment aux côtés de Lorulot dans L'Église devant ses juges, dernier livre paru de son vivant (1937), où il s'oppose à l'emprise et au pouvoir de l'Église catholique en matière d'éducation. Il n'écarte cependant pas de ses rêveries le mystère métaphysique, comme en témoignent les contes des Voyages de Psychodore (1903) et le roman La Vie éternelle (1927), teinté de réincarnationnisme.

En 1936, il adhère au Comité mondial contre la guerre et le fascisme.

Han Ryner est mort à Paris le 6 janvier 1938, à l'âge de 76 ans.

Sa fille Georgette et son gendre Louis Simon ont perpétué sa mémoire durant une quarantaine d'années au sein de la société des Amis de Han Ryner, qui ont notamment publié plus de 180 numéros des Cahiers des Amis de Han Ryner.

Le Maitron,

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Paris, mardi 15 octobre 2024