Georg Groddeck

Biographie

Médecin et psychanalyste allemand, Walter Georg Groddeck est né le 13 octobre 1866 à Bad Kösen (Allemagne). Son père, Carl Theodor Groddeck, est un médecin très réputé, directeur d'un établissement de bains salins et auteur d'un livre sur la "maladie démocratique" qui aurait inspiré Friedrich Nietzsche. Il aura quatre frères et soeurs qui tous mourront précocement de diverses maladies organiques.

Poussé dans la carrière médicale par son père, il suit ses études à Pförten et à Berlin où il obtient en 1889 son diplôme de médecin, puis devient l'assistant du Dr Ernst Schweninger, médecin personnel du chancelier Bismarck.

En 1900, avec sa soeur Lina et sa première femme Else von Goltz-Neumann, il ouvre à Baden-Baden un sanatorium de quinze lits. Imprégné de "Naturphilosophie", il soigne ses patients par diverses méthodes utilisant régimes alimentaires, massages, hydrothérapie et entretiens psychothérapeutiques.

En 1913, dans Nasamecu, la nature guérit, il rend hommage à l'enseignement de Schweninger et se livre à des considérations hygiénistes rejoignant les thèses conservatrices de son père, thèses qu'il reniera par la suite dans les Souvenirs de ma vie (1929).

En 1915, il entame une psychanalyse auprès de la suédoise Emmy von Voigt, traductrice de Freud, qui deviendra bientôt son assistante et sa seconde épouse.

Entre 1916 et 1919, il présente à ses patients quelque 115 conférences qui seront publiées sous le titre Conférences psychanalytiques à l'usage des malades, prononcées au sanatorium de Baden-Baden. Il publie également une revue intitulée Le Satanarium dans laquelle il invite ses patients à s'exprimer au même titre que lui.

En 1920, au Congrès de psychanalyse de La Haye où il se définit lui-même comme "un analyste sauvage", il rencontre pour la première fois Sigmund Freud, avec qui il entretenait déjà une correspondance depuis 1917. Il devient également membre de la Société psychanalytique allemande de Berlin. Freud appécie beaucoup ce médecin non conformiste mais ne partage pas complètement sa conception d'une technique thérapeutique parallèle alors qu'il souhaite pour sa part inscrire la psychanalyse dans le domaine de la science. Le malentendu entre les deux hommes ne sera jamais dissipé.

Georg Groddeck n'aborde pas la psychanalyse par l'étude des névroses, mais à travers l'observation de troubles que l'on appelle ordinairement "somatiques". Contestant la distinction entre psyché et soma, il considère que la maladie organique et la maladie fonctionnelle sont toutes deux, substantiellement, la création symbolique d'une force par laquelle le malade est vécu. "Le corps et l'esprit sont une entité qui héberge un Ça, une puissance par laquelle nous sommes vécus alors que nous pensons vivre", explique-t-il. Il donne le nom de Ça à cette force (terme utilisé aussi par Friedrich Nietzsche).

Pour Groddeck, non seulement la maladie est l'expression du Ça, mais toute la vie de l'homme est gouvernée par cette force inconsciente, dont la conscience n'est qu'une des manifestations. Guérir, de même que tomber malade, est le fruit d'un désir du Ça: la tâche de l'analyste sera donc de le stimuler et d'en interpréter les manifestations. Cette formulation, ainsi qu'une série d'observations sur la genèse des maladies psychiques, font de lui le fondateur de la médecine psychosomatique moderne, même s'il n'a jamais utilisé expressément le terme de "psychosomatique".

En 1921, il publie un "roman psychanalytique" qui fait scandale, Le Chercheur d'âme, dans lequel il raconte l'histoire d'un homme transfiguré par la révélation de son inconscient et pourchassant à travers le monde des "images d'âmes".

En 1923, il publie son livre le plus célèbre, Le Livre du Ça, dans lequel il met en scène sa relation épistolaire avec Sigmund Freud à travers des lettres fictives adressées par un narrateur, Patrick Troll, à une amie. Il y reprend certains concepts analytiques freudiens et explicite le concept du Ça, souhaitant ainsi populariser les concepts de la psychanalyse et exposer sa propre doctrine. Freud utilisera dès lors le terme de Ça pour ses propres théories, mais en changeant la définition dans Le Moi et le Ça.

En 1931, Groddeck publie Le double sexe de l'être humain où il exprime son antijudaïsme, renvoyant à une "haine de soi juive" les Viennois de la fin du siècle, de Karl Kraus à Otto Weininger. Il y prône la nécessité pour chaque être humain de de retrouver une bisexualité originelle refoulée par la religion juive à travers la pratique de la circoncision.

Après avoir sévèrement critiqué le régime hitlérien, il quitte en 1934 l'Allemagne pour la Suisse. Il décède le 11 juin 1934 à Knonau, près de Zurich, à l'âge de 68 ans.

Proposant avant tout une psychanalyse des maladies organiques, le parcours psychanalytique de Georg Groddeck présente, comme Carl Gustav Jung, une notable originalité par rapport à celui de Freud. Il influencera de nombreux auteurs dont notamment Wilhelm Reich (La Fonction de l'orgasme) et échangera une importante corrrespondance avec son ami Sandor Ferenczi. Parmi ses principaux ouvrages, outre Le Chercheur d'âme (1921) et Le Livre du ça (1923), citons Écrits psychanalytiques sur la littérature et sur l'art (publié en France sous le titre La maladie, l'art et le symbole) et Écrits psychanalytiques sur la psychosomatique, une série d'essais publiés après sa mort. Il est également l'auteur d'écrits de jeunesse tels que Un problème de femme (1903) et Le Pasteur de Langewiesche (1903). L'écrivain Thomas Mann s'inspirera de lui pour créer le personnage du docteur Edhin Krokovski dans son roman La montagne magique.

Julien Poincarré,
(sans date)

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