Madame de Staël

Biographie
Madame de Staël
Madame de Staël

Écrivain français, Anne-Louise Germaine Necker, baronne de Staël-Holstein, est née à Paris le 22 avril 1766.

Fille du banquier Necker, ministre de Louis XVI, elle passe son enfance dans un milieu intelligent, modéré, grave par le fond mais singulièrement mondain et ambitieux. Elle brille dans le salon de sa mère où fréquentent Buffon, Marmontel, Grimm, Gibbon.

Elle écrit des nouvelles et un drame, Sophie ou les Sentiments secrets (1786), dont la vive imagination compense les maladresses. À vingt ans, elle épouse l'ambassadeur de Suède à la cour de France, le baron de Staël-Holstein, de dix-sept ans son aîné.

On a dit de la vie de Mme de Staël qu'elle constituait le meilleur de ses romans. De fait le rôle qu'elle joue, toute jeune mariée, dans son salon de la rue du Bac, le rayonnement qu'elle exerce à Coppet, l'exil auquel elle est contrainte, ses voyages en Allemagne, en Italie et en Russie, sa liaison mouvementée avec Benjamin Constant, sa fréquentation des plus beaux esprits de l'époque, lui donnent un prestige qui dépasse de beaucoup son oeuvre même.

Elle est attachée aux préoccupations politiques de son temps. Jean-Jacques Rousseau a été son maître; il reste son inspirateur et elle lui consacre son premier ouvrage important. Aussi accueille-t-elle avec joie la Révolution. Espère-t-elle y jouer un rôle ? C'est vraisemblable, puisqu'elle proposera à Montmorin un plan d'évasion du roi et qu'elle aura suffisamment d'influence pour faire donner le portefeuille des Relations extérieurs à Talleyrand. Il le paya d'ailleurs de la plus totale ingratitude, et elle se vengea plaisamment en le peignant sous les traits d'une vieille dame sèche, coquette et égoïste dans Delphine (1802).

Pourtant, la situation de Mme de Staël à Paris devient intenable: repoussée par les républicains, elle se pose en égérie de la monarchie constitutionnelle et s'attire les sarcasmes de la noblesse; effrayée par les massacres de septembre 1792, elle fuit, avec son mari, Paris pour la Suède, puis rejoint son père à Coppet. Le gouvernement modéré de 1794 la rassure; elle revient à Paris et un grand changement s'opère en elle: sa générosité, son sens élevé de la justice et sa commisération profonde s'épanouissent. Son mariage n'a pas été heureux mais, considérant la réalité qui l'entoure, elle dépasse son propre personnage. Du reste, elle vise à la gloire; elle ne s'en cache pas et, usant de toute son influence, elle exalte de plus en plus le libéralisme, au moment où le 18 Brumaire (novembre 1799) va mettre fin à son crédit: la nouvelle scène politique ne réserve pas de place aux femmes.

Son salon devient le rendez-vous des mécontents; le pouvoir s'inquiète; Bonaparte se méfie; Fouché prévient Mme de Staël qui n'en tient aucun compte; elle est préoccupée par son livre: De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (1800), qui est unanimement critiqué. Seul Chateaubriand prend sa défense. De là date leur amitié. Opposés par le talent, les deux écrivains se retrouvent sur tous les autres plans.

1802 est une date importante pour Mme de Staël. C'est l'année où meurt son mari et celle où paraît Delphine. Le libéralisme foncier et tenace du livre augmente l'inquiétude du pouvoir. L'ouvrage de Necker: Dernières vues de politique et de finance, auquel on présumait qu'elle avait collaboré, est une occasion pour le gouvernement d'imposer à Mme de Staël, en 1803, une résidence à quarante lieues de Paris. C'est ainsi qu'elle devient grande voyageuse.

L'hostilité de Napoléon lui vaut une notoriété certaine et lui attire des sympathies nouvelles. Benjamin Constant l'accompagnera en Allemagne et en Italie. Elle s'enthousiasme pour Goethe et pour Schiller, séduits eux-mêmes par cet esprit avide de tout comprendre. Après avoir reçu un accueil empressé à la cour de Prusse en 1804, elle est rappelée en Suisse par la mort de son père. Dès lors, elle y tient une espèce de cour qui a une grande célébrité sous l'Empire. Les habitués y sont Benjamin Constant, August Wilhelm von Schlegel, Sabran, Sismondi, Bonstetten, les barons de Voigt, de Balk, etc. Chaque année y reviennent Mathieu de Montmorency, Prosper de Barante, le prince Auguste de Prusse, Mme Récamier, une foule de gens du monde, de connaissances d'Allemagne et de Genève. On imagine l'ombrage que Napoléon pouvait prendre de ce succès et qu'il ait composé ou, plus vraisemblablement, fait composer une critique sévère de Corinne ou l'Italie (1807), qui devint le livre par excellence de l'idéal et de l'amour pour toute une génération romantique.

Ne se sentant plus en sécurité à Coppet, Mme de Staël retourne en Allemagne en 1808. De Vienne, elle demande à Talleyrand d'intervenir pour que lui soient remboursés deux millions prêtés par Necker à Louis XVI. Napoléon fait la sourde oreille.

La première partie du traité De l'Allemagne étant achevée, Mme de Staël vient incognito à Paris pour la publication. Fouché a vent de l'affaire, fait saisir l'édition entière et détruire les deux mille exemplaires prêts à figurer dans le commerce. L'oeuvre la plus célèbre de Mme de Staël paraîtra à Londres trois ans plus tard (1813). En attendant, on assigne à l'auteur la résidence forcée de Coppet avec interdiction de s'en écarter de plus de deux lieues et, preuve du sérieux de cette mesure coercitive, on écrit à Schlegel en lui interdisant de revoir Mme de Staël; on exile Mme Récamier et Mathieu de Montmorency pour avoir été ses hôtes.

Mme de Staël traverse alors une période cruelle. Affectée des mesures prises par Fouché, l'âge l'assombrit. Elle a horreur de vieillir et tout lui devient âpre. Pourtant, en 1811, elle épouse un jeune officier suisse, M. de Rocca. L'année suivante, elle réussit à s'enfuir à Saint-Pétersbourg, puis en Suède et en Angleterre. Partout, elle tente de stimuler l'ardeur des ennemis de Napoléon. À Londres, elle rencontre le futur Louis XVIII, en qui elle veut voir l'homme capable de réaliser la monarchie constitutionnelle dont elle rêve. Mais elle pressent la désastreuse influence que vont avoir sur le roi les émigrés arrogants et butés: "Ils perdront les Bourbon", dit-elle.

À la Restauration, elle se fixe définitivement en France. Devant les exigences contradictoires des partis, elle prône les ménagements et la prudence. Les divergences d'opinion se déclarent dans son entourage; les amitiés se relâchent autour d'elle et elle éprouve un profond découragement. Elle court à Pise en 1816 soigner M. de Rocca malade, mais, atteinte elle-même d'un "mal incurable", elle regagne Paris et y meurt le 13 juillet 1817. Son corps est enterré à Coppet.

L'oeuvre de Mme de Staël comporte, outre les titres déjà cités, des essais de morale: De l'influence des passions sur le bonheur des individus (1796); Réflexions sur le suicide (1812); des romans; des écrits politiques: Réflexions sur le procès de la reine (1793); Du caractère de M. Necker et de sa vie privée (1804); Dix années d'exil (1821); Considérations sur les principaux événements de la Révolution française (1817); des critiques littéraires: Lettres sur le caractère et les écrits de Jean-Jacques Rousseau (1788); Essai sur les fictions (1795).

Dominique Renardet,

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Paris, mercredi 24 avril 2024