Charles-Louis Philippe

Biographie
Charles-Louis Philippe
Charles-Louis Philippe

Écrivain français, Charles-Louis Philippe est né à Cérilly (Allier) le 4 août 1874.

Après avoir échoué aux concours de Polytechnique et de Centrale en 1893 et 1894, il abandonne ses études et entre en correspondance avec Stéphane Mallarmé et René Ghil.

Employé municipal à la Ville de Paris à partir d'octobre 1896, puis nommé au Service technique des égouts, son poste lui assure une existence modeste lui permettant de s'adonner à la poésie symboliste. Mais il se tourne bientôt vers une autre recherche : collaborateur de la revue socialiste L'Enclos, puis cofondateur du Théâtre Civique, il élabore un style romanesque marqué par des thèmes à la fois naturalistes et sentimentaux.

Après La Mire et l'Enfant (1900), où il décrit sa relation avec sa propre mère, une liaison avec une prostituée lui inspire sa première grande œuvre, Bubu de Montparnasse (1901). On y découvre un pauvre provincial âgé de vingt ans, Pierre Hardy, récemment monté à Paris. Il occupe un petit emploi tout en poursuivant ses études. Un soir, il échange quelques mots avec une jeune fille, Berthe Méténier, et couche avec elle. Berthe est toutefois la maîtresse d'un mauvais garçon, Maurice Bélu, dit Bubu de Montparnasse, proxénète rusé qui l'exploite grâce à son charme et son autorité. Berthe et Pierre commencent à s'aimer mais Berthe sent qu'elle ne peut échapper au mâle dominateur et volontaire qu'est Maurice, alors que Pierre se montre faible. Elle tombe malade et doit être hospitalisée. Pierre, qui fait tout ce qu'il peut pour lui venir en aide, et Maurice, qui vient d'être emprisonné pour vol, ressentent à leur tour les symptômes de la maladie. Le malheur et la souffrance partagés rapprochent encore plus Pierre et Berthe. Celle-ci s'en trouve guérie et apaisée, mais Bubu sort de prison et l'oblige à reprendre la vie d'autrefois. Sur ce fond élégiaque et sentimental de souffrance désespérée des humbles, se détache avec un relief extraordinaire le héros de mauvaise vie, Bubu, qui fraye son chemin avec cruauté, triomphant des femmes et des faibles.

Avec Bubu de Montparnasse, comme l'a remarqué André Gide, deux aspirations contraires sont aux prises chez Philippe : la sentimentalité morbide de celui qui parlait dans ses lettres de "ce plaisir larmoyant et mélancolique qui est pour moi le plus grand des plaisirs", et le besoin de conquérir sur la mélancolie sa véritable et impérieuse personnalité.

Mais cette marche vers la "force" et la "joie", qui va de pair avec la découverte de Nietzsche, ne suffit pas à rendre à Philippe la santé qui lui manque. Atteint dès 1898 par une adénite scrofuleuse, il se sent une "pauvre petite masse de chair dolente" (Gide) propre à être écrasée par la société. Il rétorque avec ses romans, où s'exprime un besoin souverain de révolte — toujours impossible à assouvir.

Il y a d'abord Le Père Perdrix (1902), où un vieux forgeron acculé à la détresse par la maladie devient le paria d'un village et, installé à Paris où il faut tant d'énergie et de résistance pour survivre, se laisse mourir. Puis Marie Donadieu (1904) dont l'héroïne, provinciale, elle aussi montée à Paris, est en proie à un besoin de liberté et d'authenticité qu'elle met maladroitement en œuvre et qui, au final, ne fait que son malheur. Enfin, dans Croquignole (1906), qui se déroule parmi les plus modestes employés de bureau, le héros veut briser les vitres pour mieux respirer. Sans morale mais profondément débonnaire, assez fort pour aspirer encore au bonheur alors que ses collègues sont vaincus par l'apathie, c'est à lui qu'advient la chance : un héritage le sauve de son milieu et lui permet d'exalter le Pantagruel qui sommeillait en lui. Ayant au bout de deux ans épuisé son héritage, mais ayant tant joui de sa libération qu'un retour à la vie de bureau lui est devenu impossible, il se donne la mort.

Avec Le Père Perdrix, Marie Donadieu et Croquignole, Philippe manque de peu le Prix Goncourt à trois reprises. Il entame à cette époque Charles Blanchard (publié à titre posthume en 1913) en s'inspirant de la vie difficile de son père. Mais, en novembre 1909, une fièvre typhoïde se déclare et dégénère en méningite. Soigné par son ami Élie Faure, Charles-Louis Philippe s'éteint à Paris le 21 décembre 1909, à l'âge de 35 ans. Il est enterré trois jours plus tard à Cérilly.

Défunt, il donna matière à trois remarquables portraits : la description de sa dépouille par Paul Léautaud dans son Journal littéraire, le récit de ses derniers moments et de son enterrement par André Gide, enfin le sculpteur Antoine Bourdelle vint mouler son dernier visage, projetant autour du linceul des "éclaboussures de plâtre".

Christophe Beaufils,

Charles-Louis Philippe en librairie

Copyright © La République des Lettres, Paris, vendredi 13 décembre 2024
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