Écrivain autrichien naturalisé anglais, Stefan Zweig est né à Vienne (Autriche-Hongrie) le 28 novembre 1881.
Fils d'un riche industriel juif, il peut mener ses études en toute liberté, n'écoutant que son goût qui l'incline à la fois vers la littérature, la philosophie et l'histoire. L'atmosphère cosmopolite de la Vienne impériale favorise chez lui la curiosité du vaste monde. Infatigable voyageur, il parcourt à plusieurs reprises tous les pays d'Europe, visite l'Amérique du Nord, le Mexique, Cuba, les Indes, Ceylan et l'Afrique, avant d'aller mourir au Brésil.
À la découverte des pays du monde s'ajoute dès sa jeunesse la découverte des autres langues littéraires. Stefan Zweig est traducteur avant d'être écrivain: il rend magnifiquement en allemand le lyrisme de son ami Émile Verhaeren, et, plus tard, donne des versions de Charles Baudelaire, Paul Verlaine, Arthur Rimbaud, etc. Il fait ses débuts avec des poèmes où domine l'influence d'Hugo von Hofmannsthal et de Rainer Maria Rilke, Cordes d'argent (1900) et Les Guirlandes précoces (1907).
Passionné de théâtre, comme tout bon Viennois, il va admirer, les soirs de première, les grands de l'époque, Hauptmann, Sudermann, et se met bientôt à écrire des drames: Tersites (1907), La Maison au bord de la mer (1911), mais son chef-d'oeuvre scénique reste Volpone (1927).
Lorsque la guerre de 1914 éclate, Stefan Zweig, comme Romain Rolland en France, ne peut se résigner à sacrifier aux nationalismes déchaînés la réalité supérieure de la communion spirituelle des élites par-dessus les frontières. La première tourmente mondiale est la grande rupture de sa vie. Non seulement elle lui inspire de violentes protestations antimilitaristes, dans des drames comme Jérémie (1916) et L'Agneau du pauvre (1930), mais c'est elle encore qui est à l'origine de ce souci constant de n'être pas dupe des valeurs morales factices d'une société en décadence. On retrouve cette lucidité à travers toutes ses nouvelles, qui doivent une grande part à la psychanalyse de Freud. On citera en particulier Amok (1922), La Confusion des sentiments (1926), Les Heures étoilées de l'humanité (1928), Vingt-quatre heures de la vie d'une femme (1934), La Pitié dangereuse (1938), Brûlant secret (1938, trad. 1945), etc.
Tandis que dans ses oeuvres d'imagination Stefan Zweig s'emploie à démasquer les vrais ressorts de la conduite morale, en soulignant l'importance des instincts et de la sexualité, il ne cesse parallèlement dans ses oeuvres de critique de chercher un dialogue avec les plus grands et les plus divers esprits du passé. Il interroge tour à tour Stendhal et Balzac, Tolstoï et Dostoïevski, Freud et Mesmer, Dickens, Casanova, Hölderlin, Nietzsche: Trois maîtres (1919), Le Combat avec le démon (1925), etc. À la même veine, mais d'une réalisation moins heureuse, appartiennent les nombreuses biographies romancées de Fouché, Marie-Antoinette, Marie Stuart, Magellan, etc.
Peut-être est-ce à cette instinctive curiosité pour toute figure caractéristique ou pittoresque d'humanité qu'il doit d'échapper à la tentation du nihilisme qui le menace pourtant fortement, ainsi que le révèle une oeuvre comme Les Yeux du Frère éternel (1925).
Établi à Salzbourg de 1919 à 1934, Stefan Zweig quitte l'Autriche à cette date et vient s'établir à Londres. Son départ n'a aucun motif politique: l'écrivain veut simplement se consacrer aux recherches exigées par la rédaction de son Marie Stuart. Mais, inquiet sur l'avenir de l'Autriche, il reste en Angleterre et obtient en 1940 la citoyenneté britannique. Il passe ensuite aux Etats-Unis, réside pendant quelques mois dans la banlieue de New York, puis, en août 1941, décide de se fixer à Petropolis, au Brésil. Ce nouveau séjour lui semble agréable, mais Zweig, qui croit voir sombrer l'Europe, est déjà complètement désespéré. Il achève son autobiographie, Le Monde d'hier, et, le 23 février 1942, il se suicide, s'empoisonnant en compagnie de sa seconde femme, Elisabeth, une jeune secrétaire qu'il avait épousée en Angleterre.
Mélanie Wolfe,
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Paris, lundi 14 octobre 2024